Bundeshaus Bern
06.10.2023 Politique environnementale

«Votre voix compte!»

Le 22 octobre prochain, les citoyennes et citoyens suisses seront appelés aux urnes afin d’élire un nouveau Parlement fédéral. C’est une occasion importante de renforcer la protection de la nature et de rendre possible une transition énergétique qui ne se fasse pas au détriment de la biodiversité.

Si l’on analyse la législature qui s’achève, le constat est sans appel: en matière d’environnement, les choses n’ont pas beaucoup avancé. Au contraire, la pression exercée sur la nature sous la Coupole fédérale s’est considérablement accrue ces quatre dernières années (voir l’interview d’Ursula Schneider Schüttel, présidente de Pro Natura et Conseillère nationale, dans le dernier numéro du Magazine Pro Natura). La soi-disant vague verte souvent évoquée dans le sillage des élections de 2019 est retombée avant même d’avoir réellement gagné en puissance.

Le Conseil des États, un frein institutionnel

Il est particulièrement inquiétant de noter que tous les progrès réalisés en faveur de la nature et du paysage, qui avaient pourtant fait leurs preuves pendant des années, ont été balayés d’un revers de la main. Le Conseil des États s’en est donné à cœur joie. Bon nombre de membres de cette «chambre de réflexion», jadis encensée, semblent avoir perdu toute volonté ou toute capacité de réflexion, plus particulièrement pour ce qui touche aux questions écologiques. 

Le baromètre électoral des organisations environnementales montre que le Conseil des États s’est positionné contre la nature dans deux tiers des votations qui concernaient l’environnement (env. une sur deux pour le Conseil national). Le Conseil des États est un véritable frein institutionnel à la politique environnementale.

Gletschervorfeld
Aide à la décision basée sur des faits

Le site internet ecorating.ch, géré par l’Alliance-Environnement, offre une aide pratique basée sur des faits afin de permettre aux électrices et électeurs de se forger une opinion. Il évalue la position des parlementaires quant aux thématiques liées à l’environnement. Il en ressort rapidement que pour soutenir une politique écologique cohérente, les Vert·e·s et le PS, le PEV et le PVL (dans l’ordre) tiennent généralement le haut du pavé.

Et ce n’est pas tout: les projets les plus critiques du point de vue de la protection de la nature, «Solar Express» et «Wind Express», sont issus de cette même chambre haute. Développer les énergies renouvelables au détriment de la nature revient à jeter le bébé avec l’eau du bain – mais le Conseil des États n’en a cure. La population n’est pas dupe pour autant et a conscience que les chambres fédérales prennent deux voies politiques différentes. En juillet 2023, le baromètre électoral officiel de la SSR constatait une nette augmentation de la part des personnes qui trouvaient le Conseil des États «trop à droite» (31% des personnes interrogées en octobre 2019, contre 42% aujourd’hui).

La crise de la biodiversité laissée pour compte

Le fait que la crise de la biodiversité représente une menace existentielle globale est purement et simplement ignoré par la plupart des acteurs politiques. Exemple le plus désolant à ce jour : le Conseil des États a refusé de discuter de ce défi sociétal majeur et n’est même pas entré en matière sur le contre-projet indirect à l’Initiative biodiversité. Ce qui est encore plus frappant, c’est que les médias n’en parlent presque pas, alors que nous sommes en pleine campagne électorale et que les journalistes s’attachent à décrypter les défis politiques et sociétaux des quatre prochaines années. Un véritable fossé s’est creusé entre l’importance que revêt la biodiversité comme base de notre existence d’un côté, et l’ampleur de la menace qui pèse sur elle de l’autre.

Les électrices et électeurs ont-ils conscience du problème ? D’après le baromètre de la SSR, «aux yeux des électeurs le plus gros enjeu politique de la Suisse» est 

le dérèglement climatique
la protection de la nature et du paysage

Ces deux thèmes peuvent-ils créer une force de mobilisation aussi importante, ou supérieure, que lors des élections de 2019? Il est (encore) trop tôt pour le dire. Mais face à l’aggravation manifeste des crises du climat et de la biodiversité, et aux signaux d’alarme aux quatre coins du globe, une conclusion s’impose: nous avons urgemment besoin, à Berne, de femmes et d’hommes politiques déterminés et capables de relever ces défis vitaux pour rendre notre société viable à long terme.

Nos représentantes et représentants n’en sont malheureusement pas tous là, loin s’en faut. Lorsque des politiciens (bourgeois) expliquent dans la presse dominicale (NZZ am Sonntag, 16 juillet 2023) qu’il faudra à l’avenir financer l’adaptation au dérèglement climatique plutôt que de lutter contre ses causes, ils témoignent d’une approche à court-terme particulièrement inquiétante. Nous ne devons pas opposer la protection contre les effets du dérèglement climatique et la lutte contre ses causes, mais nous avons besoin des deux approches, de toute urgence. Sinon, le réchauffement sera si important que nos mesures de protection n’auront guère plus d’effets qu’une goutte d’eau sur une pierre brûlante.

Renforcer la protection de la nature

Au cours des quatre prochaines années, la Berne fédérale posera des jalons importants pour la nature et l’environnement, qui détermineront la capacité de notre société à faire face à l’avenir. D’autres décisions importantes, en matière de protection du climat, de transition énergétique, de promotion de la biodiversité, de construction en dehors des zones à bâtir et d’agriculture devront être prises. Un exemple simple : alors que j’écrivais ces lignes, j’ai appris que la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (CEATE-N) avait décidé, par 13 voix contre 8 et 3 abstentions, de maintenir son contre-projet à l’Initiative biodiversité. Une victoire d’étape importante, certes. Mais d’ici au vote final, le texte fera de nombreux allers-retours entre les deux chambres et de multiples obstacles devront être franchis, la plupart durant la nouvelle législature.

Le 22 octobre, nous avons toutes et tous la possibilité de contribuer à façonner le paysage politique suisse : ne laissons pas filer cette chance ! Analysons qui sont les politiciennes et politiciens qui s’engagent réellement en faveur de l’environnement. 

Écorating des partis (2019-2023)
Écorating

Pour cela, rendez-vous sur le site www.ecorating.ch développé par les organisations environnementales. Chaque voix compte ! Merci.

Urs Leugger-Eggimann, directeur de Pro Natura 

Informations complémentaires

Info

Cet article a été publié dans le Magazine Pro Natura.

Le Magazine Pro Natura vous dévoile les petites merveilles de la nature, vous informe au sujet de gros projets et vous présente des personnalités captivantes. Il porte un éclairage sur les dessous des décisions politiques et révèle où, comment et pourquoi Pro Natura lutte pour la nature. Tous les membres Pro Natura le reçoivent cinq fois par an.